L’AJP est déçue et inquiète suite à l’annonce du gouvernement de créer une Commission spéciale d’examen des événements du printemps 2012 qui semble être un détournement complet de la demande formulée par plusieurs dizaines de groupes pour la tenue d’un enquête publique sur la répression vécue pendant le printemps et été 2012.

Dans un premier temps, il semble que cette Commission, qui ne sera pas publique, ne se penchera pas directement sur la répression vécue par les personnes qui ont exercé des libertés fondamentales pendant le printemps érable, dont notamment celle de se réunir pacifiquement pour exprimer leur opposition à la hausse des frais de scolarité et celle de s’associer et décider démocratiquement des actions à prendre pour appuyer les revendications exprimées.

Il convient de rappeler que le rapport préparé par l’AJP, le comité légal de l’ASSÉ ainsi que la Ligue des droits et libertés fait état de brutalité policière à répétition, d’une judiciarisation à outrance et d’un mépris de la part de l’état face à celles et ceux qui contestent ses politiques. De plus, des représentants du gouvernement de l’époque ont fait des commentaires qui tendaient à stigmatiser un mouvement social et son emblème, le carré rouge, les associant à la violence et la casse alors que la violence policière n’a jamais été condamnée, ni même critiquée. C’est pour ces raisons que plusieurs dizaines d’organismes réclament la tenue d’une enquête publique sur ce qui s’est passé en 2012 et non pas un groupe de travail se penchant sur la façon de prévenir une crise sociale.

Or, dans l’annonce du Ministre, le gouvernement actuel semble suggérer qu’un mouvement populaire et majoritairement pacifique doit être scruté de la même manière que la répression policière afin de « prévenir une telle crise sociale à l’avenir ». Nous lui rappelons que les causes de la crise sociale n’ont pas besoin d’être listées par un comité de trois personnes nommées par le gouvernement. Les acteurs ayant pris part à ce mouvement historique ont formulé et défendu leurs revendications de façon claire et transparente. L’intransigeance et le mépris du gouvernement précédent à cet égard ne sont pas non plus des secrets. Ce qu’il faut analyser et prévenir, c’est la répression étatique et policière souvent passée sous silence et même renforcée à l’occasion, afin de s’assurer que la démocratie est toujours vivante au Québec. Il ne semble pas que le comité de travail aura ce mandat.

L’AJP dénonce également la présence de Monsieur Serge Ménard sur ce comité. On se rappellera que Monsieur Ménard était Ministre de la Sécurité publique lors du Sommet des Amériques qui a donné lieu à plusieurs incidents de brutalité, en plus des 469 arrestations, dont près de la moitié n’ont donné lieu à aucune poursuite. La Ligue des droits et libertés a publié un rapport de plus de soixante-dix pages, faisant état de plusieurs témoignages sur la brutalité policière subie par les manifestantes et manifestants lors de ce sommet. Or, lorsqu’il a été questionné, dix ans plus tard, sur l’intervention policière lors de ce sommet, Monsieur Ménard a affirmé que «Nous avons été les meilleurs au monde» . Il est donc douteux que ce dernier puisse faire preuve d’un esprit critique face au travail policier.

L’AJP rappelle qu’une vraie enquête indépendante sur la répression subie par la population lors du printemps 2012 s’impose. L’AJP rappelle au gouvernement que cette enquête est nécessaire pour préserver, et non étouffer dans l’œuf, le droit à la contestation pacifique qui est l’oxygène de toute démocratie.

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